Nous arrivons à Tsetang vers 16h, posons nos sacs à toute vitesse dans notre hôtel pendant que Khamsang est allée établir le permis et filons vers la forteresse Yumbulakang.
Cette petite forteresse à flanc de colline est la plus ancienne du Tibet, elle aurait été bâtie vers le 5ème siècle et était le premier bâtiment «en dur» du pays! C’était en quelque sorte le «palais royal», un peu riquiqui tout de même avec ses 3 minuscules étages!
Le prix d’entrée est comme d’habitude, très exagéré pour payer des moines qui prennent plus de soin à vérifier que les touristes payent la grasse taxe photo qu’à entretenir les quelques bougies au beurre de Yak qui brûlent. Une affiche prétextant le respect des normes incendie exhibe les portraits des quelques moines pas très enthousiastes sont aux côtés des policiers Chinois, on frise le ridicule!
La courte visite est néanmoins intéressante car nous voyons pour la première fois de magnifique peinture murale décrivant l’enterrement céleste Tibétain. Pour ceux qui n’auraient pas vu le film «Kundun», il y a plusieurs sortes d’enterrement au Tibet, grosso modo trois : mise en stûpa, l’enterrement terrestre et céleste. La mise en stupa est réservée aux personnes de grande importance comme les Dalaï Lamas, l’enterrement terrestre est réservé aux «pourris», voleurs, bandits de toutes sortes et enfin le plus pratiqué et le plus surprenant, l’enterrement céleste. L’enterrement céleste consiste à détruire le corps totalement pour bien appliquer l’impermanence de toute chose, ainsi le corps est découpé en public en fins morceaux, jetés aux vautours, les os nettoyés de leur chair sont broyés et dispersés dans la nature.
La campagne environnante est magnifique mais curieusement, les villageois Tibétains semblent forcés d’arborer le drapeau Chinois le plus haut possible sur leur maison, malheureux…
Tsetang c’est peut être le mauvais avenir du tourisme au Tibet, en effet, le PSB (Public Security Bureau) local impose un prix minimal pour une chambre, quelque soit la gamme. Ainsi une chambre double avec salle de bain, même pourrie, ne se trouve pas à moins de 200Yuans (20€), ce qui est une sacrée somme ici. Les Chinois en veulent toujours plus ici, ça frôle le racket organisé… Je ne comprends pas ces agissements, sûrement que les Chinois espèrent décourager le visiteur mais ils ne sont quand même pas assez stupides pour croire que nous accuserons les Tibétains (ce sont toujours eux qui reçoivent mais toujours un Chinois qui possède et⁄ou contrôle).
Nous passerons néanmoins une excellente nuit dans cet hôtel qui vaut son prix puisque moyenne gamme. Nous avons changé le programme en partant dès demain matin vers Gyantsé, en passant par le magnifique monastère de Samyé.
Un bon petit déjeuner à l’occidental plus tard (ils avaient pensé que les Européens ont horreur du breakfast Chinois!), nous voici sur la route, ou plutôt le chemin défoncé, en traversant nombre de pâturages devenus de dangereux petits déserts, la situation semble, selon moi, dramatique sur ce point. Les petits vendeurs d’encens dans le monastère contribuent sûrement à minima à cette dégradation en ignorant que les racines de ces arbustes que l’on brûle pour Bouddha, retiennent la faible couche d’humus évitant les glissements de terrain, l’appauvrissement des sols et la désertification. Le soucis semble bien trop avancé pour y remédier avec si peu de moyens…
Pour exemple, la Chine a dépensé 3 fois plus pour la liaison de train Golmud-Lhassa qu’elle n’a dépensé en 50ans pour la santé et l’éducation au Tibet… Le sous-sol Tibétain est extrêmement riche et la ligne de chemin de fer a été conçue avant tout pour transporter ces trésors. Imaginez que plus de 50% des réserves mondiales de Lithium se trouvent au Tibet, l’avenir se porte sur l’électrique portable, donc sur les batteries et donc sur le Lithium!! Rien que pour cela, la Chine ne lâchera pas facilement le toit du monde!
Construit au 8ème siècle, le monastère de Samye est le tout premier du pays, l’un des mieux conservés, l’un des plus beaux et l’un des seuls en forme de mandala (forme circulaire). Le temple principal symbolise le mont Méru tandis que à chaque direction, quatre temples symbolisent les 4 continents avec chacun deux sous-continents. N’oublions pas, au milieu des 1032 stupas et 108 temples, les quatre magnifiques stupas de différentes couleurs offerts par les ministres du roi d’alors.
A tout point de vue, cet édifice est spectaculaire, l’extérieur est magnifique mais son vrai trésor est à l’intérieur sur ses fresques murales, malheureusement en danger extrême. Le site a cruellement besoin de financement non détourné par les Chinois! Le prix d’entrée est très raisonnable pour une fois, comme quoi ce sont ceux qui en ont le plus besoin qui en exige le moins!
A la révolution culturelle, comme près de 5000 temples à travers le pays, Samyé fut rasé, les restes furent transformés en étables, tandis que certains murs sont encore criblés de balles. Moins de 80 moines y résident actuellement, c’est terrifiant lorsque l’on connaît la grandeur du site.
Une curieuse double paroi à l’intérieur est bondée d’enfants, la croyance dit que si l’enfant ne ressort pas, alors ses pêchers n’ont pas été pardonnés. Une autre pratique un peu naïve consiste à ramper en dessous des étagères des livres sacrés, la croyance veut qu’on s’instruise de leur contenu en un éclair! Ici, pas trop de pollution mercantile, cela reste raisonnable, nous avons quand même vu l’entrée d’un monastère où ils avaient carrément la machine de banque à compter automatiquement, le business de la religion va un peu trop loin parfois… Surtout que vu les prix d’entrée, les taxes photos, les donations à gogo de gens très pauvres, ces foutus portraits de Mao sur chaque billet accrochés partout dans les monastères, les machines bancaires, les montres dorées des moines ainsi que leur téléphone portable, on se demande sérieusement si tout ceci n’est pas exagéré et éloigné du principe de renoncement!!!
Le temple a également la particularité d’être construit sur 3 niveaux, chacun dans un style différent. Le premier dans un style Tibétain, le second dans un style Chinois et le troisième Népalais. L’architecture de la charpente du troisième est particulièrement intéressante. Nous finissons cette jolie visite par les quatre stupas aux yeux éloignant les démons sur les quatre points cardinaux et la ferméture de Yulia dans les toilettes publiques par l’inadvertance d’une employée. Les membres de notre groupe ont eu un coup de fou rire ayant trouvé Yulia derrière les portes WC entrouvertes cadenassées. Elle a eu le droit à quelques photos…
Nous reprenons la route assez tôt car nous devons arriver à Gyantsé pour le festival annuel des chevaux en passant par le lac Yamdrok et le glacier Karo La.